« S'il suffisait qu'on s'aime » : une analyse féministe intersectionnelle du parrainage conjugal au Québec
Autor: | Suelves Ezquerro, Lorena |
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Jazyk: | francouzština |
Rok vydání: | 2023 |
Předmět: | |
Druh dokumentu: | Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Popis: | Titre de l'écran-titre (visionné le 8 janvier 2024) Cette thèse est née de la volonté de comprendre les mécanismes qui régulent l'expérience du parrainage conjugal, dispositif central des migrations par alliance au Québec, dans une perspective féministe intersectionnelle. Le but de ma recherche était de faire la lumière sur les manières dont les différents rapports sociaux, les divers systèmes d'oppressions et leurs intersections affectent les personnes et les couples qui ont recours à ce procédé pour tenter de se réunir au Québec. Le parrainage conjugal se situe à la croisée entre le désir de regroupement de conjoint·e·s et les politiques gouvernementales qui régulent la vie privée des individus et des couples, ce qui en fait un site d'observation privilégié pour une recherche anthropologique s'intéressant aux manières dont les inégalités sociales genrées, classistes et raciales, notamment, sont reproduites dans le contexte des migrations internationales. En réalisant ma recherche doctorale, je voulais aussi élucider si le parrainage conjugal avait une incidence sur les dynamiques conjugales et si, en quelque sorte, l'amour suffisait à surmonter les obstacles rencontrés à travers les différentes étapes liées au processus. Pour avoir un portrait global de la situation, je me suis intéressée à l'expérience du parrainage conjugal à trois moments différents : la période de préparation de la demande de parrainage, la période d'attente des réponses gouvernementales et la période qui suit l'obtention de la résidence permanente par la personne parrainée. Prenant ancrage dans la compréhension de l'intersectionnalité de Patricia Hill Collins (2000, 2017), j'ai adapté sa matrice de domination pour analyser le phénomène du parrainage conjugal et le processus à plusieurs niveaux. Cette matrice de domination est composée de quatre domaines de pouvoir : le structurel (lois d'immigration et institutions gouvernementales), le disciplinaire (le traitement administratif des demandes d'immigration et la complexité bureaucratique), l'hégémonique (les différents systèmes d'oppressions, mais aussi les discours, normes et pratiques de la société d'accueil, notamment incarnées par la logique de l'amour romantique) et enfin, le domaine des interactions interpersonnelles (entre les personnes impliquées, ce qui réfère ici aux dynamiques conjugales). Par le biais d'une méthodologie basée principalement sur les récits de vie, j'ai rencontré sur une période de quatorze mois un total de 43 personnes vivant ou ayant vécu le parrainage conjugal à des moments différents du processus. Afin d'analyser les diverses intersections des systèmes d'oppressions, les critères de sélection ont visé une diversité de personnes participantes : parrains, marraines et personnes parrainées de genres, origines, âges et orientations sexuelles variés. L'analyse féministe intersectionnelle mobilisée m'a permis de démontrer que le parrainage conjugal est loin d'être un phénomène neutre. Il reproduit certaines formes de discrimination basées sur le genre, la classe et l'origine des personnes parrainées et ce, aux différentes étapes du processus. De cette manière, les exigences bureaucratiques du parrainage conjugal peuvent discriminer les couples homosexuels, ou ceux dont la relation ne semble pas être basée purement sur l'amour romantique. En effet, l'authenticité de la relation conjugale est au cœur de la procédure et c'est à l'aune de l'amour romantique qu'elle est jaugée par les agent·e·s d'immigration qui étudient les dossiers de parrainage. Il a été aussi démontré que ces procédures reproduisent des discriminations de classe et d'origine, notamment lorsque les conjoint·e·s en instance de parrainage proviennent des pays des Suds. En outre, le parrainage conjugal renforce les rapports sociaux de sexe au sein du couple, et encourage une quadruple dépendance (légale, économique, sociale et émotionnelle) des personnes parrainées envers les personnes qui parrainent, dont les principales victimes sont les femmes. Les résultats montrent également comment, bien que toutes les personnes impliquées soient exposées à différents types de violences (conjugales, institutionnelles, structurelles et/ou symboliques) aux diverses étapes du processus; les oppressions que vivent les personnes parrainées les rendent particulièrement vulnérables. Malgré les privilèges dont disposent les personnes qui parrainent, les responsabilités qui leur incombent ont également des effets délétères. Dans ce contexte complexe, les résultats mettent en lumière les façons dont les individus et les couples impliqués font preuve d'agencéité et de résistance face aux discriminations et aux violences qui se manifestent tout au long du processus. Somme toute, le parrainage conjugal est une procédure usante pour les couples, et les résultats démontrent que pour y arriver, il ne suffit pas seulement de s'aimer. This thesis aims to understand the mechanisms that regulate the experience of spousal sponsorship, the main procedure to facilitate the alliance migration in Québec, from an intersectional feminist perspective. The goal of my research was to shed light on the ways in which different social relationships, systems of oppression and their intersections affect individuals and couples who use this process to reunite in Quebec. Spousal sponsorship is situated at the intersection between the desire to reunite spouses and the government policies that regulate the private lives of individuals and couples. This makes it a privileged site of observation for anthropological research on the ways in which social, gendered, classist, and racial inequalities, among others, are reproduced in the context of international migration. In conducting my doctoral research, I also wanted to elucidate whether spousal sponsorship had an impact on marital dynamics and whether, in some way, love was enough to overcome the obstacles encountered throughout the different stages of the process. To obtain a complete picture, I analyzed the experience of spousal sponsorship at three different moments: the period of preparation of the sponsorship application, the period of waiting for responses from the different governments (federal and provincial), and the period after the person sponsored by his or her spouse obtained permanent residence. From Patricia Hill Collins' (2000, 2017) understanding of intersectionality, I adapted her matrix of domination to analyze the phenomenon of spousal sponsorship and the process at different levels. This domination matrix is composed of four domains of power: the structural (immigration laws and governmental institutions), the disciplinary (the administrative processing of immigration applications and bureaucratic complexity), the hegemonic (the different systems of domination, but also the discourses, norms and practices of the host society, especially embodied in the logic of romantic love) and, finally, the domain of interpersonal interactions (between the people involved, which here refers to marital dynamics). Using a methodology based primarily on life story approach, I met for fourteen months with a total of 43 people who were or had been experiencing spousal sponsorship at different points in the process. In order to analyze the various intersections of systems of oppression, the selection criteria targeted a diversity of participants: spousal sponsors and spouses who had been or were being sponsored of different genders, backgrounds, ages, and sexual orientations. The intersectional feminist analysis allowed me to demonstrate that spousal sponsorship is far from being a neutral phenomenon. It reproduces certain forms of discrimination based on gender, class, and origin of the sponsored persons at different stages of the process. Thus, the bureaucratic requirements of spousal sponsorship can discriminate homosexual couples or those whose relationship does not appear to be based purely on romantic love. In fact, the authenticity of the spousal relationship is at the core of the process, and it is under Western romantic love criteria that the relationship will be evaluated by state officials. It has also been shown that these procedures reproduce class and origin discriminations, especially when the sponsored come from the South. In addition, spousal sponsorship reinforces gender relations within the couple and fosters a fourfold dependency (legal, economic, social and emotional) of the sponsored persons on their sponsor, and the main victims are women. The results also show how people involved are exposed to different types of violence (marital, institutional, structural and/or symbolic) at various stages of the process. However, people being sponsored are particularly vulnerable to these types of violence. Despite the privileges available to the sponsors, the responsibilities placed on them also have deleterious effects. Within this complex context, the findings highlight the ways in which the individuals and couples involved demonstrate agency and resilience towards situations of discrimination and violence throughout the process. Ultimately, spousal sponsorship is a grueling process for couples, and the results demonstrate that love is not enough to overcome the difficulties. Esta tesis nace del deseo de comprender los factores que regulan la experiencia del apadrinamiento conyugal, un proceso clave de la migración por alianza en Quebec, desde una perspectiva feminista interseccional. El objetivo de mi investigación es el de esclarecer las formas en que las diferentes relaciones sociales, los sistemas de opresión y sus intersecciones afectan a las personas y parejas que se sirven de este proceso para intentar reunirse en Quebec. El apadrinamiento conyugal se sitúa en la intersección entre el deseo de reunir a los cónyuges y las políticas gubernamentales que regulan la vida privada de los individuos y las parejas. Esto lo convierte en un lugar de observación privilegiado para la investigación antropológica sobre la creación de desigualdades sociales de género, clasistas y raciales, entre otras, en el contexto de la migración internacional. Durante mi investigación, también quise dilucidar si el apadrinamiento conyugal tenía una repercusión en la dinámica de la pareja y si, de algún modo, el amor bastaba para superar los obstáculos encontrados a lo largo de las distintas etapas del proceso. Para obtener una imagen de conjunto completa, analicé la experiencia del apadrinamiento conyugal durante tres momentos diferentes: el período de preparación de la solicitud de apadrinamiento, el período de espera de las respuestas de los diferentes niveles de gobierno (federal y provincial), y el período posterior a la obtención de la residencia permanente por parte de la persona apadrinada por su cónyuge. Partiendo de la comprensión de la interseccionalidad de Patricia Hill Collins (2000, 2017), he adaptado su matriz de dominación para analizar el fenómeno del apadrinamiento conyugal a diferentes niveles. Esta matriz de dominación se compone de cuatro dominios de poder: el estructural (las leyes de inmigración y las instituciones gubernamentales), el disciplinario (la tramitación administrativa de las solicitudes de inmigración y la complejidad burocrática), el hegemónico (los diferentes sistemas de opresión, pero también los discursos, normas y prácticas de la sociedad de acogida, especialmente encarnados en la lógica del amor romántico) y, por último, el dominio de las interacciones interpersonales (entre las personas implicadas, que aquí se refiere a las dinámicas de pareja). Utilizando una metodología basada principalmente en historias de vida, me reuní durante catorce meses con un total de 43 personas que vivían o habían vivido el apadrinamiento conyugal durante diferentes momentos del proceso. Para analizar las distintas intersecciones de los sistemas de opresión, los criterios de selección se centraron en una diversidad de personas participantes: cónyuges que apadrinaban, y cónyuges que habían sido o estaban viviendo el apadrinamiento, buscando una diversidad de género, de origen, de edades y de orientaciones sexuales. Mi análisis feminista interseccional me ha permitido demostrar que el apadrinamiento conyugal dista mucho de ser un fenómeno neutro. Este reproduce ciertas formas de discriminación basadas en el género, la clase social y el origen de las personas apadrinadas durante las distintas fases del proceso. De este modo, los requisitos burocráticos del apadrinamiento conyugal pueden discriminar a las parejas homosexuales o a aquellas cuya relación no parece basarse puramente en el amor romántico. De hecho, la autenticidad de la relación conyugal está en el centro del proceso, y es bajo criterios del amor romántico occidental que la relación será evaluada por los y las funcionarias del Estado. También se ha demostrado que estos procedimientos reproducen discriminaciones de clase y de origen, sobre todo cuando los cónyuges en proceso de apadrinamiento proceden de países del Sur. Además, el apadrinamiento conyugal refuerza las relaciones de género en el seno de la pareja y fomenta una cuádruple dependencia (legal, económica, social y emocional) de las personas apadrinadas respecto a las personas que apadrinan, cuyas principales víctimas son las mujeres. Los resultados demuestran igualmente cómo, a pesar de que todas las personas implicadas están expuestas a diferentes tipos de violencias (conyugal, institucional, estructural y/o simbólica) durante las diferentes etapas del proceso, las opresiones que sufren las personas apadrinadas las vuelven especialmente vulnerables. A pesar de los privilegios de los que disponen las personas que apadrinan su cónyuge, las responsabilidades que se les imponen también tienen efectos nocivos sobre ellas. En este complicado contexto, los resultados ponen de relieve las formas en que las personas y parejas implicadas demuestran su capacidad de agencia y resistencia frente a la discriminación y las violencias a lo largo de todo el proceso. En definitiva, el apadrinamiento conyugal es un proceso agotador para las parejas, y los resultados demuestran que el amor no lo puede todo. |
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