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Au XIXᵉ siècle en France, les monstres sont plus que visibles ; ils occupent le devant de la scène. Ils sont présents dans des domaines aussi divers que la science (avec la tératologie —la première “science” des monstres), la politique, où se dessinent des évènements “monstrueux” signalant une rupture de la norme, et la foire, où les spectateurs paient pour voir des formes grotesques. En prenant les exemples de deux œuvres littéraires : Notre Dame de Paris (1831) de Victor Hugo et A rebours (1889) de Joris-Karl Huysmans, nous examinerons comment la production à grande échelle des monstres a cependant pour résultat la banalisation du monstre comme figure extraordinaire. Nous soutiendrons qu’il existe une évolution du “monstre-humain” romantique au “monstre-objet” décadent qui reflète la monstruosité morale du créateur lui-même : une métamorphose du visible à l’invisible. Cette notion prend racine dans le contexte d’une notion évolutive de la construction philosophique nature/artifice où s’inscrivent d’importantes avancées technologiques, telles que les machines-outils (destinées à construire les pièces de machines). Cela marque un changement dans les perceptions des rôles de l’homme et de la nature dans le champ de création. Le monstre évolue d’un être extraordinaire (semblable aux créatures de la foire) à un objet banal, facile à reproduire, qui reflète les peurs de la production de masse dans une société industrielle. Enfin, en abordant les enjeux de la monstruosité et de la visibilité, nous montrerons comment le monstre devient visible même dans la forme du texte littéraire du XIXᵉ siècle, avec la naissance d’un roman-monstre. |