Le techno-complexe hoabinhien en Asie du Sud-est continentale : L’histoire d’un galet qui cache la forêt

Autor: Hubert Forestier, Heng Sophady, Vincenzo Celiberti
Jazyk: angličtina
Rok vydání: 2017
Předmět:
Zdroj: Journal of Lithic Studies, Vol 4, Iss 2 (2017)
Druh dokumentu: article
ISSN: 2055-0472
DOI: 10.2218/jls.v4i2.2545
Popis: La préhistoire du Sud-est asiatique se caractérise par un matériel lithique dont les chaînes opératoires restent encore peu connues ou mal décrites. Cette méconnaissance s’explique par l’éloignement géographique de ces régions tropicales vis à vis des problématiques préhistoriques occidentales développées depuis maintenant deux siècles. La préhistoire de l’Extrême-Orient est complexe, originale, surprenante parfois paradoxale car en marge des grandes lignées techniques connues ailleurs pour la période concernée, celle qui a vu l’avènement de l’Homme anatomiquement moderne. Cette préhistoire régionale d’environ 2 millions de km2 que l’on nomme l’Asie du Sud-est péninsulaire ou continentale renvoie à l’élaboration d’une science en mouvement dont la construction est toujours d’actualité. En se heurtant à la thèse classique de l’évolution comme à celle du progrès technique, le Hoabinhien bouscule les règles et les repères en préhistoire. Il se situe aux antipodes du modèle classique (Eurasiatique, Africain) de développement des outils de pierre selon l’enrichissement et l’allègement progressif de l’outillage depuis la pebble culture jusqu’au Néolithique. C’est précisément sur cette singularité que porte notre réflexion à propos d’un phénomène technique unique qui reste difficile à positionner sur l’axe évolutif des industries tel qu’il existe ailleurs dans le monde ou en Asie de l’Est (Chine, Corée, Japon). La régularité et l’homogénéité des formes d’outils façonnées sur galet dans un vaste espace et sur une durée record de près de 30 000 ans sont les caractéristiques principales de ce technocomplexe peu orthodoxe qui interroge la capacité cognitive d’Homo sapiens en écosystème tropical humide. Mais aussi, la question de la nature des liens existants entre l’homme et ses productions lithiques ou la place occupée par la technique de la pierre taillée lors du développement humain dans cette région hors d’Europe. A cette monotone pérennité d’outils sur galet se greffe l’absence d’outils lithiques pointus (pointe, extrémité apicale, outil à bords saillants convergents, etc.) tels qu’ils se rencontrent partout ailleurs chez les groupes de chasseurs-cueilleurs qu’ils soient du Paléolithique supérieur ou (sub-)actuels. C’est pourquoi la stabilité de ces outillages sur galet cacherait tout un pan de complexité inconnu du domaine technique comme l’insaisissable travail des matières dures d’origine animale mais surtout végétale non conservées à ce jour dans les niveaux archéologiques. Le cheminement du minéral vers la question du végétal renvoie à la nécessité de compléter la « boîte à outils » des artisans préhistoriques hoabinhiens par des objets pointus. Connue à ce jour qu’à travers les données de l’ethnographie, la « civilisation du végétal » conduit tout naturellement à réfléchir sur l’importance de ce matériau périssable dans le bagage outillé des derniers chasseurs-cueilleurs de la forêt tropicale d’Asie du Sud-est continentale. Autrement dit, la possibilité d’une autre existence technique en équilibre avec le milieu extérieur. Après avoir mis en avant l’originalité du phénomène culturel hoabinhien au regard de l’impact de la recherche en préhistoire et en paléoanthropologie dans les régions du Sud-est asiatique, cet article présentera d’un point de vue strictement qualitatif, les chaînes opératoires du techno-complexe hoabinhien. Faciès industriel sur galet qui caractérise la principale culture technique des chasseurs-cueilleurs du Paléolithique final d’Asie du Sud-est entre environ 30 000 et 5 000 ans BP. Plus largement des précisions seront apportées d’une part sur l’inachèvement informatif du phénomène lithique en tant que donnée archéologique et d’autre part, sur son dépassement en tant que phénomène. Il s’agira donc de repenser l’envers de la dialectique lithique-lignic c’est-à-dire les objets du végétal à jamais disparus, à la lumière des objets de pierre taillée seuls conservés comme marqueurs de temps, de technique, d'espace et d’absence.
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