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À partir d’une lecture de trois textes récents, cet article s’attache à décrire une poétique particulière, qui met en rapport expérimentation formelle et engagement politique. D’un retournement l’autre (2011) de Frédéric Lordon, Poétique de l’emploi (2018) de Noémi Lefebvre et Les enfants vont bien (2019) de Nathalie Quintane inventent tous trois, selon des modalités différentes, des formes visant à rendre inopérante une langue (politique, médiatique, économique) jugée délétère. Nous montrons qu’à la suite des analyses de Victor Klemperer au sujet de la colonisation de la langue allemande par le national-socialisme, ces écrivains mettent en lumière les ruses et les tours de la “novlangue” contemporaine. Leurs textes ne se limitent toutefois pas à en constater les effets néfastes : tout en dévoilant le caractère pernicieux de cette langue qui se propage au point de devenir commune, ils visent, par le biais d’une série de formes poétiques que nous mettons en évidence, à lui ôter son pouvoir. Chez ces auteurs, la création littéraire est résolument branchée sur l’action politique. Dans la lignée des réflexions de Giorgio Agamben sur la révolution, nous proposons de qualifier leur poétique de destituante. |