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Mallarmé commence ses traductions de Poe à l’époque où, jeune homme, il cherche sa propre poésie, ainsi qu’une poétique et une métaphysique renouvelées. Il développe son langage poétique en imitant, dans une prose assouplie, les constructions anglaises de Poe, et en saisissant l’occasion des maladresses rythmiques et verbales de Poe pour créer des combinaisons de sons inouïes et des configurations syntaxiques rares. Sa correspondance de l’époque témoigne d’une lutte entre une réalité qui résiste au moi et la tendance irréalisante de l’esprit, et de la crise célèbre de dépersonnalisation que Poe a pu influencer. Mallarmé transforme la descente « impie » de Poe dans les abîmes de l’inconscient, en une exploration profane du vide métaphysique ; sa lecture en partie abusive de Poe et des « régions extrêmes de l’esprit » semble l’aspirer vers une manière d’impuissance. En prenant tout à fait au sérieux, cependant, le projet profond de Poe, Mallarmé le révèle aux lecteurs de langue anglaise. Ses traductions contribuent aussi à une théorie de la traduction, en montrant l’aptitude de celle-ci à changer un poète étranger et à changer à la fois la poésie du traducteur et la langue dans laquelle il traduit. Mallarme begins to translate Poe at the time when he is developing his own poetry, poetics and metaphysics. He finds most of what he needs for his new poetic language by imitating in French prose the English constructions of Poe, and by taking the opportunity of Poe’s often awkward rhythms and phrasing to create rare combinations of sounds and unheard syntactical configurations. His correspondence of the time reveals a struggle between the claims of a reality independent of the self and the unrealising tendency of the mind, and a famous crisis of depersonalisation which Poe may well have influenced. Mallarme, wittingly or unwittingly, transforms Poe’s « unholy » descent through the chasms of the unconscious into a secular exploration of the metaphysical void, and is perhaps led by his partial misreading of Poe into « extreme regions of the mind » which account in part for his contention with poetic impotence. In taking seriously the extremity of Poe’s project, however, Mallarme sees further than English-speaking readers of Poe. His translations also exemplify the power of translation both to change an original re-creatively and to change the translator’s own poetry and native language. |