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Les changements récents rencontrés par plusieurs temples taoïstes (Quanzhen) en Chine centrale, occasionnés par une politique de grands travaux, prennent un sens particulier si on les considère dans la suite de la profonde rupture qui avait déjà marqué le paysage religieux durant la Révolution culturelle (1966-1976). La mise en perspective des deux époques très contrastées m’amène au constat troublant qu’après la disparition des temples et les efforts qui ont été faits pour leur résurgence, ce sont souvent aux quartiers les avoisinant d’être détruits. Les communautés de voisinage, qui portent la mémoire des temples et les font vivre, se voient alors démantelées. Cet article prend pour objets anthropologiques ces destructions de village ou de quartiers urbains, et les bouleversements qu’elles occasionnent dans la vie sociale. Il s’appuie sur un terrain ethnographique au long cours dont il s’agit de montrer la valeur heuristique pour comprendre le sens prêté localement à ces phénomènes de table rase, mais aussi la façon dont le point zéro d’observation de chacun (y compris de l’ethnologue) détermine sa perception de l’événement. Il montre enfin que le principe de « l’offrande en retour du vœu exaucé » établit une relation directe entre les dons — utilisés pour embellir et agrandir périodiquement les temples — et l’efficacité rituelle prêtée à ces lieux saints. Recent changes undergone by several (Quanzhen) Daoist temples in Central China, caused by a major-works policy, take on a special meaning if considered in light of the aftermath of the profound break that had already marked the religious landscape during the Cultural Revolution (1966-1976). Placing the two highly contrasting periods in perspective has led me to the troubling observation that after the disappearance of the temples and the efforts made to resurrect them, nearby districts have often ended up destroyed. Neighbouring communities that uphold the memory of the temples and bring them alive find themselves being dismantled. This article takes as its anthropological subjects these destructions of villages or urban districts, and the upheavals they cause in the life of the society. It is based on long-term ethnographic fieldwork, whose heuristic value will be shown in order to understand not only the meaning that is locally attributed to these tabula rasa phenomena, but also how everyone’s zero point of observation (including that of the ethnologist) determines their perception of the event. Finally, it shows that the principle of “the offering in return for the granted wish” establishes a direct relationship between donations—used to periodically embellish and enlarge the temples—and the ritual effectiveness ascribed to those holy places. |