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Le dernier roman d’Anne Garréta, Dans l’béton (2017), est à première vue un léger récit d’enfance qui s’écarte du reste de son œuvre, qui est marquée par un projet politique d’écriture contre la différence. Malgré cette rupture apparente, Dans l’béton est aussi politique que les romans qui le précèdent, ce qui peut se voir dans la façon dont L’opoponax, le récit d’enfance de Monique Wittig, sert comme intertexte. Cette intertextualité a été entièrement effacée dans la réception de Dans l’béton. Elle a plutôt porté son attention aux comparaisons avec Zazie dans le métro de Raymond Queneau en raison des ressemblances entre le néofrançais de Queneau et l’expérimentation linguistique de Garréta. La force politique du roman de Garréta émane de son traitement des deux matériaux qu’il met en relief : le béton dont le titre du roman dérive et la merde qui vont de pair tout au long du texte. Je montre comment le béton et la merde sont transformés en arme afin d’attaquer les structures sociales de la famille hétérosexuelle et de la race, leur matérialité intraitable reflétant la matérialité intraitable du langage lui-même. Le langage dans Dans l’béton prend la place de la merde et du béton en tant que matière. C’est avec lui qu’il devient possible de construire autre chose que des structures sociales néfastes qui continuent à se reproduire à l’infini, comme la production interminable de béton par le père, ou la production continuelle d’excréments par les vaches. |