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Objectif : le lupus systémique est une maladie hétérogène, caractérisée par un large panel d'auto-anticorps et par des manifestations cliniques très diverses, pouvant conduire à des pronostics très différents. L’analyse en cluster est un outil utile pour identifier des sous-groupes de patients en fonction de leurs profils cliniques et sérologiques dans une maladie aussi hétérogène que le lupus. Plusieurs études ont déjà été réalisées utilisant cette approche, en se basant sur une analyse en cluster à partir des auto-anticorps. A l’aide d'une analyse en cluster hiérarchisée non supervisée, notre objectif était de détermine des phénotypes homogènes distincts de patients atteints de lupus systémique, à partir de leurs manifestations cliniques. Méthodes : nous avons réalisé une étude observationnelle à partir de la base de données française multicentrique SAPL/LUPUS (ClinicalTrials.gov : NCT02782039). Nous avons inclus les patients ayant un lupus systémique remplissant les critères de classification SLICC (Systemic Lupus International Collaborating Clinics). Nous avons d’abord réalisé une analyse non supervisée en correspondance multiple, puis une classification hiérarchique ascendante. Nous avons sélectionné 30 variables couvrant un large panel de manifestations cliniques et biologiques de lupus (en dehors des auto-anticorps) pour réaliser l’analyse. Résultats : nous avons inclus 440 patients, principalement des femmes (94,3%). L'âge médian au diagnostic était de 24 [19-32] ans, et la durée médiane de suivi depuis le diagnostic de 11 [5-17] ans. L'analyse en cluster a mis en évidence trois groupes homogènes de patients avec peu de chevauchement entre les groupes. Le cluster 1 (n=91) comprenait des patients provenant principalement d'Europe, avec un syndrome des antiphospholipides dans 84,6% des cas, et fréquemment des manifestations cliniques et biologiques en rapport avec ce dernier, telles qu’un livedo, des convulsions, une thrombopénie et une anémie hémolytique. Le cluster 2 (n=221), le plus fréquent, était composé de patients présentant peu de manifestations cliniques, principalement articulaires (86%), et peu d’auto-anticorps. Ce cluster était plus fréquemment associé au syndrome de Sjögren (10,9%). Le cluster 3 (n=128) comprenait des patients présentant la plus grande diversité de manifestations cliniques spécifiques de lupus (cutanées, articulaires, pleurales, cardiaques, hématologiques, et glomérulonéphrites prolifératives), la plus grande diversité d'auto-anticorps (54,7%, 53,1% et 46,1% des patients porteurs d’anticorps anti-Sm, anti-SSA et anti-RNP respectivement), et une consommation du complément (89,8%). Ce cluster était plus fréquemment associé à une origine asiatique ou sub-saharienne. Conclusions : dans cette étude d’analyse en cluster non supervisée, nous avons déterminé trois sous-groupes homogènes de patients atteints de lupus systémique, soulignant l'hétérogénéité de cette maladie. Cela pourrait permettre une prise en charge plus personnalisée des patients lupiques en fonction de leur cluster. De plus, le développement des connaissances en génétique et des techniques d’immunologie moderne dans cette maladie, telles que la « signature interferon » ou l’expression de BAFF, pourraient permettre une classification des patients plus précise, et aboutir à une prise en charge encore plus personnalisée. |