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Cet article vise à mettre en évidence un cas relativement précoce d’institutionnalisation des relations entre guerre, sciences et techniques. Du fait de son vaste empire s’étendant des péninsules italienne et ibérique à l’Amérique, la Monarchie hispanique joua un rôle pionnier dans le changement d’échelle qui bouleversa les armées européennes à partir du XVIe siècle. Or, si l’avènement du canon moderne ainsi que la croissance des effectifs des armées ont été l’objet de nombreuses publications, peu d’études se sont intéressées à saisir l’impact de ces transformations sur le personnel technique qualifié, et en particulier sur les individus en charge de l’artillerie. Le nombre de ces « artilleurs » (artilleros en espagnol) au service de la Monarchie hispanique passa ainsi de quelques dizaines à la fin du XVe siècle à plusieurs milliers à l’époque de la Grande Armada de 1588. La présentation propose donc d’explorer le système qui, de Madrid aux quatre coins de l’empire, fut mis en place à partir des années 1560 afin de relever ce formidable défi en termes de gestion des compétences techniques et des ressources humaines. Il s’agira notamment de mettre en évidence l’émergence d’institutions monarchiques, les écoles d’artilleurs, où des centaines de marins, de soldats et d’artisans apprirent les aspects théoriques et pratiques de l’usage du canon. En outre, l'abondance de matériel conservé par l'administration militaire des Habsbourg permet un questionnement en profondeur quant à la nature des savoirs transmis et discutés au sein de ces écoles. Elle autorise enfin un examen, rare pour le XVIe siècle, des multiples liens entre les milieux d'enseignement technique et la publication de traités militaires qui proposèrent alors une réduction en art de l'artillerie à l'aide de savoirs mathématiques hybrides. |
