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This article explores the discursive and argumentative procedures that build the legitimacy and authority of Chancellor Angela Merkel in her first TV address on Covid-19. Establishing a necessary distinction in these two correlated and often confused notions, the analysis uncovers a global “rhetoric of the coronavirus”: staging of institutional legitimacy reinforced by the unity of the rulers (an all-encompassing “we”) and building of authority by the argument of epistemic authority (experts); justification of anti-Covid measures by pragmatic arguments or by historical examples; construction of an ethos that ensures credibility. The analysis also reveals procedures specific to emergency situations: enhancement of an absolute and illusory political consensus, at the expense of open democratic deliberation; reduction of scientific discourse to the discourse of experts likely to provide certainty to decision-makers, transformed into managers; calls on the public to accept of its own free will measures already enacted. Finally, the article highlights the specificities of Merkel's speech on this occasion: the meta-discourse that tackles head-on the relationship to democracy, but also to argumentation, the insistence on human values considered superior to the democratic values violated, the posture of proximity supposed to contribute to moral legitimation and to strengthen the authority of the Chancellor. The ethical dimension of the discourse is all the more salient because it relies heavily on pragmatic arguments. Another characteristic of Angela Merkel’s singular self-presentation is the confession of her own fragility, the image of a sensitive woman who unites reason and feeling, the emphasis on an ethic strongly imbued with affectivity that gives her a very human accent and calls for “solidary action” rather than for mere obedience. Cet article se propose d’étudier les procédures discursives et argumentatives qui construisent la légitimité et l’autorité de la Chancelière Angela Merkel dans sa première allocution télévisée sur la Covid-19. Instaurant une distinction nécessaire en ces deux notions corrélées et souvent confondues, l’analyse dégage une rhétorique globale du coronavirus : mise en scène de la légitimité institutionnelle renforcée par l’unité des gouvernants (un « nous » englobant), construction d’autorité par le recours à l’argument d’autorité épistémique (les experts), justification des mesures anti-Covid par des arguments pragmatiques ou par l’exemple, construction d’un ethos qui assure une crédibilité. En même temps, l’analyse dévoile des procédés propres aux situations d’urgence : mise en valeur d’un consensus politique absolu, et illusoire, aux dépens d’une délibération démocratique ouverte ; réduction de la parole scientifique à une parole d’experts susceptible de fournir des certitudes aux décisionnaires, transformés en gestionnaires ; déplacement des valeurs démocratiques du plan de l’action vers le plan du discours ; demande au public d’accepter de son plein gré des mesures d’ores et déjà édictées. Enfin, l’article souligne les spécificités de la parole de Merkel en cette occasion : le métadiscours qui aborde de front le rapport à la démocratie, mais aussi à l’argumentation, l’insistance sur les valeurs humaines considérées comme supérieures aux valeurs démocratiques enfreintes, la posture de proximité censée contribuer à la légitimation morale et à renforcer l’autorité de la Chancelière. La dimension éthique du discours est d’autant plus saillante qu’elle s’appuie fortement sur des arguments pragmatiques. Une autre caractéristique est la présentation de soi singulière d’Angela Merkel : aveu de sa propre fragilité, image de femme sensible qui unit la raison et le sentiment, appui sur une éthique fortement imprégnée d’affectivité qui lui donne un accent très humain et qui en appelle à « l’action solidaire » plus qu’à l’obéissance. |