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L’individu se nourrit d’un ensemble de concepts dont il n’a pourtant aucune expérience sensorielle ou motrice. Cette capacité à transcender le monde physique pour construire un univers de représentations abstraites comme celles d’astrophysique ou de temps est considérée comme l’une des plus sophistiquées de la cognition humaine. Si l’implication des processus sensorimoteurs dans le traitement des mots concrets est aujourd’hui établie, leur rôle dans la représentation et le traitement des concepts abstraits est au cœur d’un vif débat. À partir d’une analyse des données de la littérature, et de propositions théoriques comme celles de la réutilisation neuronale et de l’apprentissage par corrélation, nous avons exploré une piste explicative de l’ancrage des concepts abstraits temporels. Dans une série de cinq expériences, nous avons étudié le rôle du mouvement dans l’émergence des effets de congruence spatio-temporelle lors de la reconnaissance visuelle de mots véhiculant des informations temporelles. Nos résultats suggèrent que le mouvement joue effectivement un rôle clé dans le traitement de ces mots. Plusieurs propositions théoriques (non exclusives) peuvent être faites à la lumière de nos résultats. La première est que le concept de temps pourrait s’ancrer directement dans l’expérience temporelle qui accompagne l’exécution du mouvement. En ce sens, les chevauchements qui existent entre temps et espace n’impliqueraient pas que le temps soit intrinsèquement de nature spatiale, mais que temps et espace soient confondus parce que vécus ensemble via le mouvement. La deuxième est que les mécanismes qui sous-tendent la représentation et le traitement des concepts temporels pourraient réutiliser ceux de la planification motrice et de la cognition spatiale. La troisième est que l’action répétée de lire et écrire pourrait constituer l’expérience sensorimotrice de premier ordre qui définit le cadre d’ancrage de temps, et lie ensemble espace et temps. |