Dermohypodermite nécrosante d’évolution défavorable sous antibiotiques : un nouveau cas documenté de loxoscélisme cutané

Autor: C. Rollard, E. Rubenstein, C. Herlin, Albert Sotto, D. Laureillard, C. Lechiche, P.E. Stoebner
Rok vydání: 2015
Předmět:
Zdroj: La Revue de Médecine Interne. 36:A180
ISSN: 0248-8663
Popis: Introduction Le loxoscelisme est une envenimation par morsure d’araignee du genre Loxosceles, dont les manifestations peuvent etre strictement cutanees, ou bien systemiques et parfois letales [1] . Commun sur le continent americain, il est meconnu en Europe, malgre une incidence croissante notamment sur le pourtour mediterraneen [2] . Observation Une femme de 36 ans, sans antecedent, habitant dans une zone semi-rurale du sud de la France, ressent en debut de matinee une lesion douloureuse de la face interne de la cuisse gauche, avec un erytheme limite et un prurit. Dans la journee, elle constate une extension de l’erytheme avec une sensation de brulure d’intensite croissante et des frissons. Malgre l’introduction par son medecin traitant d’une antibiotherapie par pristinamycine, elle consulte aux urgences le soir meme devant l’intensite de la douleur. Elle a alors une febricule a 38 °C, et un erytheme indure centre par une vesicule de petite taille. Un diagnostic de dermohypodermite est evoque, et la patiente retourne a son domicile. Elle est adressee a la consultation d’infectiologie le lendemain ou il est constate une lesion devenue ecchymotique avec un diametre de 8 a 10 cm et un contour irregulier, entouree d’un halo pâle et d’un œdeme erythemateux indure de l’ensemble de la cuisse. S’y associent une adenopathie inguinale inflammatoire homolaterale et un exantheme scarlatiniforme generalise. Il existe un syndrome inflammatoire biologique isole et les hemocultures restent steriles. La tomodensitometrie montre une infiltration sous-cutanee de la cuisse gauche sans signe d’abces. La patiente est hospitalisee et mise sous antibiotherapie intraveineuse par amoxicilline–acide clavulanique et clindamycine. A 72 heures de traitement, des zones necrotiques apparaissent au sein de la lesion ecchymotique, la vesicule centrale devient hemorragique, et l’erytheme est majore. Le caractere hyperalgique de l’atteinte necessite une antalgie par morphiniques. Apres avis dermatologique, l’hypothese de loxoscelisme cutane est evoquee. Effectivement, en reprenant l’interrogatoire, la patiente se souvient avoir tue une araignee alors qu’elle s’habillait dans sa salle de bains, le matin de l’apparition de la lesion. Retrouvee par sa famille, l’araignee est envoyee au Museum d’histoire naturelle de Paris et identifiee comme appartenant a l’espece L. rufescens. Apres un traitement symptomatique, et une poursuite de l’antibiotherapie pendant 10 jours, la patiente est reevaluee a 3 semaines. La lesion prend alors la forme d’un ulcere recouvert par une plaque necrotique bien limitee, avec une disparition de l’erytheme. Une excision chirurgicale est effectuee 3 semaines plus tard, permettant une cicatrisation complete. Discussion La morsure d’araignee du genre Loxosceles est responsable de lesions d’aspect variable, de la simple reaction urticarienne a la lesion caracteristique observee dans notre cas (aspect « bleu/blanc/rouge » compose d’un centre ecchymotique avec parfois une vesicule hemorragique, un halo pâle ischemique et un erytheme indure) [1] , [2] . La cinetique est rapide, avec apparition de douleur et d’erytheme en quelques heures et evolution necrotique en 72 heures [1] . La morsure est habituellement indolore et rarement remarquee par les patients. De ce fait, le diagnostic est la plupart du temps presomptif [3] . Notre cas a la particularite d’avoir une documentation objective par un arachnologiste. Le loxoscelisme est une affection meconnue en Europe. Prise a tort pour une dermohypodermite, elle peut faire l’objet d’un retard diagnostique et de l’introduction systematique d’antibiotiques, pourtant inutiles (le taux de surinfection etant rare, quelle que soit l’extension de la necrose) [3] . Aucun traitement specifique n’a prouve d’efficacite dans la litterature, et la prise en charge initiale repose sur un traitement symptomatique [3] . La prise en charge chirurgicale (excision, greffe cutanee), si elle est necessaire, doit etre differee de plusieurs semaines afin d’eviter une extension de la reaction inflammatoire et necrosante due au venin [2] . Conclusion En cas de dermohypodermite necrosante d’evolution defavorable sous antibiotherapie, le loxoscelisme cutane est un des diagnostics a evoquer.
Databáze: OpenAIRE