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Introduction L’erythroblastopenie est une pathologie mal connue. Elle est definie par l’absence ou la rarefaction (moins de 5%) des erythroblastes dans la moelle, contrastant avec une richesse et maturation normale des lignees myeloides et megacaryocytaires. Elle peut etre aigue ou chronique, constitutionnelle ou acquise d’origine multiple et de pronostic globalement favorable. Nous rapportons une nouvelle observation d’erythroblastopenie survenue chez une patiente suivie pour lupus erythemateux systemique avec un syndrome de Goujerot-Sjogren et une thyroidite de Haschimoto alors qu’elle etait traitee par mycophenolate mofetil pour nephropathie lupique sur rein unique. Observation Une patiente âgee de 23 ans etait suivie depuis 2014 pour un lupus erythemateux systemique avec atteinte articulaire non destructrice a l’IRM et nephropathie glomerulaire sur rein unique congenital, associe a un syndrome de Goujerot-Sjogren et une thyroidite de Haschimoto. Elle recevait un traitement par antipaludeen de synthese et une corticotherapie a pleine dose associee a 6 boli bimensuels d’Endoxan ® relaye par mycophenolate mofetil (2 g/j). L’evolution etait marquee par la negativation de la proteinurie de 24 h. Cependant, la synovite des mains etait invalidante et rebelle motivant l’adjonction du methotrexate (10 mg/j) avec bonne evolution. Par ailleurs, au moment du diagnostic, une anemie ferriprive a 6 g/dL avec une ferritinemie a 4,3 ng/L etait decouverte. En octobre 2015, la patiente a ete rehospitalisee pour anemie mal toleree avec dyspnee au moindre effort isolee sans notion de saignement exteriorise. L’examen clinique etait normal. L’anemie etait microcytaire hypochrome aregenerative a 3,3 g/dL (VGM = 54, TCMH = 19, reticulocytes = 27 000/mm) sans autre anomalie a l’hemogramme. La ferritinemie etait a 186 ng/L et le test de Coombs direct etait negatif. La proteinurie etait de 1 g/24 h. La FOGD et l’echographie pelvienne etaient normales. La patiente a ete transfusee par 3 culots globulaires phenotypes, resultant en une hemoglobinemie post-transfusionnelle a 8,8 g/dL. La dose de mycophenolate mofetil a ete augmentee a 3 g/j devant la nephropathie lupique recidivante. Un mois apres, elle a reconsulte pour dyspnee, polyarthralgies d’horaire inflammatoire des mains et des genoux. Une synovite des mains etait objectivee a l’examen. Les dosages biologiques ont revele une anemie microcytaire aregenerative a 4.5 g/dL (VGM = 54, TCMH = 19, reticulocytes = 23 000/mm) sans autre anomalie a la numeration. La transferrinemie etait normale a 0,11 g/L. Les dosages de folate, de vitamine B12 et TSH etaient normaux. Elle a ete transfusee par 3 culots globulaires phenotypes (hemoglobinemie post-transfusionnelle a 6,7 g/dL) et recu une corticotherapie 1 mg/kg/j. Apres 8 jours de corticotherapie, l’hemoglobinemie avait de nouveau rechute a 4,1 g/dL. Devant l’atypie du tableau, un myelogramme a ete fait et a permis d’etablir enfin le diagnostic d’erythoblastopenie. Un role declenchant, ou au moins aggravant, du mycophenolate mofetil a ete suspecte a la lumiere des donnees de la litterature, motivant l’arret de ce medicament remplace par l’azathioprine avec bonne evolution; l’hemoglobinemie actuelle est a 8 g/dL. Discussion L’erythroblastopenie acquise peut etre idiopathique ou associee a une autre affection; thymome (50%), infectieuse notamment a Parvovirus B19, auto-immune tel que c’est le cas de notre patiente, ou bien un syndrome lymphoproliferatif, en premier lieu une leucemie lymphoide chronique ou enfin iatrogene. Les medicaments les plus incrimines sont les anti-epileptiques (par exemple: phenytoine, carbamazepine, valproate de sodium); azathioprine; chloramphenicol; sulfonamides; isoniazide; procainamide et erythropoietine humaine recombinante et recemment le mycophenolate mofetil. Dans notre observation le role du mycophenolate mofetil n’est pas certain etant donne que la patiente avait d’autres signes de poussee lupique; articulaire et renale. Des transfusions sont habituellement necessaires en plus du traitement etiologique. Une thymomectomie s’impose en cas de thymome. L’arret d’un eventuel traitement dont le role declenchant ou aggravant est suspecte ou rapporte dans la litterature est egalement necessaire. Le traitement par des immunoglobulines intraveineuses est indique particulierement dans les infections a Parvovirus B19 avec succes. Ailleurs, une corticotherapie (1 a 2 mg/kg/j) est indiquee. En cas de corticoresistance, des therapies diverses ont etaient prescrites avec succes; l’azathioprine comme chez notre patiente, cyclophosphamide, ciclosporine, serum antilymphocytaire, plasmaphereses, immunoglobulines intraveineuses, et plus recemment le rituximab. L’effet se manifeste habituellement au bout de 6 semaines a 3 mois. Cependant, aucune etude controlee n’est disponible dans cette affection rare. Conclusion Faire le diagnostic d’une erythroblastopenie devant une anemie est en pratique important devant les implications therapeutiques qui en decoulent. |