Questions épistémologiques et éthiques sur les techniques appliquées au génome humain

Autor: A. Ivasilevitch, P. Charlier
Rok vydání: 2018
Předmět:
Zdroj: Ethics, Medicine and Public Health. 6:146-157
ISSN: 2352-5525
DOI: 10.1016/j.jemep.2018.04.005
Popis: Resume Dans cet article, notre propos est de dresser un tableau de l’ensemble des enjeux ethiques impliques par les techniques de modification ciblee du genome. En particulier, lorsque celles-ci s’appliqueraient a un embryon humain, au titre de therapies geniques germinales. Deployee en un triptyque, notre reflexion se penchera tour a tour sur la question du « comment » des nouvelles biotechnologies, puis sur la question du « qui », pour terminer sur la question du « quoi ». A la premiere partie, revient donc le probleme de la faisabilite technique des therapies geniques. Apres des remarques liminaires sur la temerite de certains projets, c’est a l’epreuve de la biologie moleculaire et a l’epigenetique que l’on interrogera leur efficacite. Dans la mesure ou l’organisme vivant, pour l’homme, est aussi un corps-vecu, on y ajoutera la question de savoir quels impacts pourrait produire un remaniement des genes sur l’identite de la personne genetiquement modifiee. La deuxieme partie, quant a elle, sera consacree au statut de l’embryon humain. Par une incursion dans l’Antiquite, ou le debat sur sa nature existait deja, puis par une comparaison avec les arguments qui se font aujourd’hui entendre, on soulignera l’aporie de ce debat, qu’il s’agit de le depasser, qu’il ne saurait representer un obstacle a la reflexion. Sur cette lancee, on degagera le benefice qui pourrait etre tire de l’exercice de therapies geniques germinales, loin de froisser la dignite inherente reconnue a l’embryon. On repondra a l’argument de certains auteurs, a l’instar de Tristram Englehardt Jr., selon lesquels une manipulation du genome de l’embryon pourrait s’assimiler au simple exercice d’un droit de propriete sur une chose, laquelle reponse nous conduira a defendre un statut gradue de l’embryon, evolutif, s’inscrivant dans le sillage des explications emises par le CCNE sur la notion de « personne humaine potentielle ». Ce statut expose, on conclura alors en analysant comment les therapies geniques germinales, cette fois considerees comme nouvelles methodes de procreation, pourraient s’integrer dans la legislation en vigueur. Enfin, comment parler des techniques de modification genetique sans parler du transhumanisme, sans parler de l’eugenisme ? Voila qui nous amene a la troisieme partie. Concretement, quelle anomalie devrait etre eradiquee du genome de l’embryon ? Parce que cette operation porte sur une lignee germinale, par suite transmissible a toute la descendance, donc aux generations futures : qu’est-ce qui devrait etre corrige du patrimoine genetique de l’humanite ? Et, par la montee du nouveau paradigme porte par le transhumanisme, le paradigme melioriste : pourquoi ne pas augmenter ce patrimoine ? Au cœur de la polemique : quelle place accorder a la contingence genetique ? Ici, on opposera le paradigme therapeutique au paradigme melioriste. Ceci dit, il s’agira surtout de voir que l’opposition n’est pas aussi rigoureuse, qu’il existe une porosite entre les deux. Par endroits, la frontiere se brouille, et les deux communiquent : l’art medical peut lui-meme etre amelioratif en agissant en dehors de toute pathologie, le meliorisme peut repondre a un souci therapeutique. De meme, si l’eugenisme est le danger qui porte son ombre, on verra que c’en est une forme inedite qui se profile, celui-ci liberal, et qui n’epargne ni le therapeutique, ni le meliorisme. Pour l’un, l’horizon s’obscurcit par le risque d’une « procreation responsable » exuberante, pour l’autre, par celui d’une sorte d’epuration genetique, une course eperdue au perfectionnement.
Databáze: OpenAIRE