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Étude réalisée à la demande du Département de l'Isère, dans le cadre du dispositif Nature-Culture Rapport d'opération d'archéologie programmée de sondage Vol I/I Région Auvergne-Rhône-Alpes / Département de l'Isère (38); L’étude archéologique de la bonde de fond de l’étang a été conduite entre le 3 et 7 septembre 2018. Elle s’inscrit dans le cadre de travaux menés par le Département sur la digue et la mise en place de nouvelles bondes. L’opération de terrain a consisté à décrire, relever et analyser les vestiges de la grande bonde en menant des observations détaillées de sa structure. Elle visait à renseigner les processus de construction (reconnaissance des matériaux mis en œuvre, des outils utilisés) et aussi les modifications survenues au cours des siècles. L’objectif était également d’établir une chronologie relative de la structure et de la compléter au moyen de datations dendrochronologiques (Christophe Perrault CEDRE). Pour appuyer le relevé archéologique, un relevé lasergrammétrique a été réalisé pendant l’opération par Olivier Veissière (Patrimoine Numérique). L’étude a ainsi permis de mieux appréhender la grande bonde de l’étang de Monjoux qui se compose de deux structures en bois raccordées l’une avec l’autre pour permettre de vider la retenue de son eau, en lien avec son activité piscicole passée. La première structure est un double système de canalisation qui assurait le passage de l’eau au travers de la digue. Ces conduits, dits « conches » se composent d’une série d’auges emboîtées les unes à la suite des autres. Elles ont été réalisées dans de très gros chênes évidés en forme de U. Le dessus des conduits était recouvert par des couvercles (planchons) cloués. L’étude a montré que l’étanchéité, entre les conduits et leurs couvercles, était assurée par de la mousse végétale.La seconde structure appelée portique, ou « devant » de la bonde, est implantée dans l’épaisseur de la digue. Elle sert à retenir la terre et les pierres à la manière d’un coffrage. Elle comprend trois murs de madriers de chêne empilés les uns sur les autres jusqu’au sommet de la chaussée. Ces murs de bois sont appelés épauliers et contrecœur. Leur stabilité est assurée par des poteaux et des jambes de force. Le dispositif est renforcé par des tirants mis en travers des murs sud et nord. La structure présente peu d’assemblages, la jonction des pièces de bois est essentiellement assurée par de puissants clous. Le portique accueille deux mécanismes, dits « pilons » actionnables depuis le haut de la digue pour fermer et ouvrir les conduites (conches) prises dans la digue.Les pièces de bois de la grande bonde conservent quelques traces d’outil malgré leur immersion prolongée dans l’eau. Les chênes ont systématiquement été équarris à la hache. Le même outil a été employé pour évider les auges des conches. Des traces de sciage ont également été identifiées sur les faces des couvercles. Le sciage apparaît en effet le seul moyen pour débiter des pièces plus fines. Le travail des scieurs de long se reconnaît à la surface des couvercles par les sillons irréguliers et positionnés en biais par rapport aux arêtes des pièces.D’un point de vue structurel, la bonde apparaît dans l’ensemble relativement bien conservée et homogène. Les observations révèlent toutefois quelques reprises. On a, en effet, noté que les jambes de force avaient été moisées et que des tirants avaient été ajoutés dans le but de renforcer la structure. Outre ces renforts, un des deux pilons à massue a été remployée à côté d’un système de pelle tenue par des étriers métalliques appartenant à la dernière phase de reconstruction de la bonde (XIXe s.). Si l’on fait abstraction des renforts ajoutés relativement récemment, la jonction des pièces de bois par de gros clous en forme de T, qui apparaissent dans la construction en bois à l’époque moderne, suggère que la structure n’est pas antérieure à cette période. Cette observation coïncide avec les dates de la fin du XVIIIe siècle (1765-1768d) obtenues par l’analyse dendrochronologique menée en 2014 sur l’extrémité visible d’une des deux canalisations.Pour préciser la date de construction de la bonde, les archéologues ont mené à l’occasion des travaux engagés par le Département de l’Isère en 2018 une nouvelle campagne de datation dendrochronologique (Christophe Perrault, CEDRE). Les analyses précisent que la grande bonde a été reconstruite à plusieurs reprises. La structure que l’on connaît aujourd’hui appartient à la première décennie du XIXe siècle (après 1803d). Lors de cette reconstruction, les artisans ont réemployé des pièces de bois des bondes précédentes. L’analyse dendrochronologique démontre en effet que des bois (auges) appartiennent au XVIIIe siècle, mais surtout elle atteste le réemploi de plusieurs pièces d’une bonde (auge, couvercle, jambe de force) datée de la fin du XIVe siècle ou du début du XVe siècle (après 1379d). |