La didactique de l’histoire aux prises avec la logique des acteurs

Autor: Morand, Brigitte, Serres, Guillaume
Přispěvatelé: Activité, Connaissance, Transmission, éducation (ACTé ), Université Clermont Auvergne [2017-2020] (UCA [2017-2020]), Morand, Brigitte
Jazyk: francouzština
Rok vydání: 2017
Předmět:
Zdroj: Quelles références pour les didactiques de l’histoire, de la géographie, de l’éducation à la citoyenneté ?
Quelles références pour les didactiques de l’histoire, de la géographie, de l’éducation à la citoyenneté ?, Oct 2017, Bordeaux, France
Popis: International audience; Le but de cette communication est de présenter le cadre théorique d’une recherche en cours, qui réunit deux chercheur-e-s d’horizons différents (analyse de l’activité pour G. Serres, didactique de l’histoire pour B. Morand), et qui avait initialement pour objectif d’alimenter la formation. L’idée était de repérer les stratégies mobilisées par des professeur-e-s d’histoire-géographie expérimenté-e-s face à de nouvelles prescriptions. Cette première étude, tenue au printemps 2012, portait sur l’enseignement de guerre froide en classe de première, thème qui, dans le nouveau programme, connaissait d’importants bouleversements de contenus et de méthodes. Il était donc propice à des investigations portant sur le travail de conception de l’enseignement en amont de la classe, au moment où le/la professeur-e, seul-e, en l’absence des élèves, réalise des choix de contenu et de démarche. Cinq entretiens individuels d’environ trois heures ont été réalisés entre les deux chercheur-e-s et les enseignant-e-s. Il s’agissait de les remettre en situation (Theureau, 2010) afin qu’ils décrivent, de façon située, la façon dont ils avaient composé avec ces nouvelles prescriptions. L’analyse ne cherchait pas à produire de la généralité mais plutôt à décrire et apprécier les arbitrages ainsi que la façon dont les enseignants les vivaient.Sur le plan des résultats, la comparaison des études de cas a permis de dégager les points communs, mais aussi les nuances dans leur rapport à la prescription, au métier, aux élèves et à eux-mêmes. Elle semble aussi témoigner d’une reconfiguration du modèle disciplinaire (fin de la continuité chronologique, introduction des études de cas, rupture de la boucle didactique (Audigier, Crémieux & Mousseau, 1996 cités par Fontanabona & Thémines, 2005), reconfiguration résultant de choix permettant aux enseignants de rester en accord avec leur conception du métier. Sur le plan théorique, une double approche didactique et ergonomique (Robert & Rogalski, 2002) a été retenue afin d’envisager à la fois ce qui est souhaitable de faire (d’un point de vue didactique) et acceptable (du point de vue de la logique des acteurs). Cette approche est à nos yeux primordiale pour comprendre leurs intentions, multiples, et pour développer une analyse qui rende compte du caractère multi-déterminée et multi-adressée de l’activité des enseignants (Goigoux 2007). Notre cadre conceptuel est basé sur les postulats suivants : 1. La dimension didactique est au cœur du travail de l’enseignant-eLes travaux en didactique de l’histoire et de la géographie ont montré que l’enseignement de ces disciplines s’inscrit dans un modèle disciplinaire mettant en avant un paradigme pédagogique positiviste articulant solidairement les contenus, les méthodes et les finalités de ces disciplines. Ainsi s’organise une « logique des pratiques disciplinaires du secondaire en histoire-géographie », un système dans lequel découpage du temps scolaire, logique des programmes, logique de l’exposition (des savoirs), et conceptions de l’apprentissage éclairent cette stabilité, qui peut être perçue comme une résistance au changement (Tutiaux-Guillon, 2008). 2. Le travail de conception est envisagé comme un effort de lecture, d’interprétation et de redéfinition des prescriptions.C’est à la tâche redéfinie, au sens de Leplat (1980), que nous nous sommes attachés afin de mettre à jour les tensions propres au travail de conception. Les entretiens réalisés avaient pour objectif de permettre aux enseignant-e-s de resituer leurs choix, afin de comprendre ce qui les conduit parfois à prendre de la distance vis-à-vis de la prescription, vis-à-vis de l’épistémologie de la discipline ou encore vis-à-vis de pratiques qu’ils jugent efficaces et/ou égalitaires, et questionnent leurs valeurs en tant que professeur-e, en tant que professeur-e d’histoire géographie, en tant qu’acteur clef de la formation du citoyen. Les premiers entretiens réalisés avaient pour but d’accéder, autant que faire se peut, à la logique des acteurs. Nous avons cherché, dans un premier temps, à décrire leurs choix, en restant au plus près de ce qu’ils pouvaient en dire, dans une logique compréhensive. L’enjeu était d’identifier les buts qu’ils se donnent tout en prenant la mesure des contraintes et ressources propres à chacun. Il ne s’agissait pas d’en juger le bien-fondé, mais de comprendre pour quelles « bonnes raisons » (Charlot, 1997, cité par Fontanabona & Thémines, 2005) les enseignants choisissent de privilégier tel contenu, telle démarche, tel type de document ou support, telle partition entre les activités réalisées en classe avec le guidage du professeur et les activités dévolues aux élèves seuls, hors classe. Une seconde opération de recherche est en cours, à plus vaste échelle et portant cette fois sur un chapitre qui, outre le fait de présenter des caractéristiques similaires, comporte une forte dimension « sensible », puisqu’il s’agit de l’enseignement « des nouvelles conflictualités » que l’on compare avec celui des « conflits du monde actuel » en classe de troisième (que le nouveau programme revisite). Nous y ajoutons l’enregistrement vidéo de séances de classe, celles portant sur les attentats du 11 septembre 2001, afin de pouvoir comparer entre les choix des enseignant-e-s de collège (classe de troisième) et ceux de lycée (classe de première). L’enjeu est maintenant de construire une interprétation des choix qui nous sont exposés (et des actions observées), interprétation qui doit prendre en compte les tensions mais aussi les points de convergence entre nos différents « pôles » de références : - l’analyse de l’activité, qui met en avant la logique des acteurs, leurs contraintes, leurs conceptions de l’histoire et son enseignement, de leurs élèves, de leur métier…- l’épistémologie de l’histoire, qui considère les contenus enseignés au regard de l’évolution du savoir savant - la didactique de l’histoire, qui vise une analyse de la prescription (enjeux scientifiques, politiques, civiques) et des choix de transposition (supports, documents, questionnement). Pourquoi chercher à interpréter les choix faits par les enseignant-e-s ? Il s’agit pour nous de mieux démêler l’écheveau des éléments du système afin de faire la part des contraintes qui s’imposent aux enseignant-e-s, et ainsi de mieux identifier les espaces de liberté, les domaines où il leur est possible réellement d’agir. Comment interpréter et qualifier les choix des acteurs ? Ces choix sont-ils « opportunistes » (Lantheaume 2007), ou bien relèvent-ils davantage de stratégies ? Ainsi par exemple, le transfert observé des études de cas hors du cours « ordinaire » (Fontanabona & Thémines 2005) est-il le signe d’une « sanctuarisation » du cours, ou est-ce une façon pour les enseignant-e-s de s’essayer à de nouvelles méthodes sans remettre en cause trop brutalement l’équilibre fragile du cours ?Si les recherches en didactique ont, in fine, pour objectif d’aider les enseignant-e-s à faire évoluer leurs pratiques et donc de renforcer leur efficacité au service des apprentissages, ces questions sont fondamentales. C’est dans l’interaction entre les différents des pôles de références que nous pensons trouver réponse afin d’identifier des compromis qui, du point de vue de notre étude, seraient à la fois acceptables (du point des professeur-e-s) et souhaitables (du point de vue des apprentissages).
Databáze: OpenAIRE