La Guerre froide dans les manuels scolaires d’histoire français de 1960 à 2011 : le roman national, suite… et fin ?

Autor: Morand, Brigitte
Přispěvatelé: Serres, Guillaume, Activité, Connaissance, Transmission, éducation (ACTé), Université Blaise Pascal - Clermont-Ferrand 2 (UBP), Université de Rennes 2
Jazyk: francouzština
Rok vydání: 2015
Předmět:
Zdroj: Les disciplines scolaires : miroirs des évolutions contemporaines de la nation ?
Les disciplines scolaires : miroirs des évolutions contemporaines de la nation ?, Université de Rennes 2, Mar 2015, Rennes, France
Popis: International audience; L’histoire en tant que discipline scolaire a été utilisée depuis le XIXème siècle comme instrument de construction de l’identité nationale, et cet enseignement est toujours aujourd’hui jugé indispensable à la formation du citoyen. Pourtant, il a considérablement évolué (au gré d’expérimentations et de réformes plus ou moins durables) au cours de la seconde moitié du XXème siècle, tant dans ses contenus que dans ses méthodes. Depuis les années 2000 plus particulièrement, cet enseignement est l’objet de profondes mutations, qu’elles soient d’ordre didactique, historiographique ou idéologique.Si les programmes scolaires constituent le premier observatoire de ces évolutions, les manuels scolaires sont également un support privilégié pour cette étude. Ces ouvrages ne peuvent prétendre refléter les pratiques réelles de classe, mais ils sont de bons supports pour l’analyse des évolutions et des tensions à l’œuvre dans l’enseignement de l’histoire. Ils répondent d’abord au programme, qui définit les contenus et « normalise » le discours scolaire. Support de transposition didactique, les manuels répercutent également (avec parfois beaucoup de retard) l’évolution du savoir scientifique, et se font l’écho des débats idéologiques et épistémologiques qui en nourrissent la construction. Le discours des manuels peut ainsi être guidé par des considérations idéologiques, par des traditions didactiques, ou encore par la mémoire individuelle des auteurs (qui guide la sélection et l’interprétation des événements). C’est de plus un produit commercial (en France du moins, où l’État n’exerce aucun contrôle sur son édition ou sa distribution). Son contenu est donc conditionné par des considérations économiques (coûts de production, attentes supposées ou réelles des enseignants prescripteurs…) qui peuvent en infléchir le discours. Enfin, les manuel doivent aussi être « acceptables » par les parents d’élèves, et plus globalement toutes les personnes sensibles aux contenus d’enseignement. Le chapitre sur la Guerre froide dans les manuels du secondaire de 1960 à 2011 fournit un excellent objet pour étudier ces évolutions, et pour comprendre comment les contenus de cet enseignement s’adaptent et reflètent les évolutions de la nation, ou du moins son image. En effet, la guerre froide a construit l’interprétation globale du monde dans lequel elle s’est déroulée, lui fournissant un cadre conceptuel et idéologique. Mais elle a ce faisant aussi revêtu, au travers de la question de la place de la France dans ce conflit, de véritables enjeux identitaires, qui relaient ou prolongent, à l’échelle de l’Europe et du monde, le roman national.Cette communication montrera d’abord comment, des années 1960 à 2000, le discours des manuels scolaires sur la Guerre froide (non seulement le « texte-auteur » qui structure la leçon, mais aussi les documents iconographiques, les documents-textes, les cartes, les citations de référence) reflète la conception que les auteurs ont, consciemment ou non, de la place de la France dans le monde (références gaulliennes par exemple, ou liées à la mémoire collective savamment construite par des générations de manuels scolaires républicains). Dans un second temps nous verrons que cette remarquable continuité, voire stabilité, du discours sur la Guerre froide est rompue dans les manuels scolaires les plus récents. Cette rupture tient évidemment aux nouvelles prescriptions (ruptures du récit chronologique, introduction d’études de cas, même si elles ne portent pas ce nom), mais elle reflète aussi une actualisation historiographique ainsi que la vision que les acteurs politiques se font de notre place dans le monde : les manuels scolaires nous offrent de la Guerre froide une vision d’un monde révolu, où la France n’y occupe plus la place centrale. Pour être plus précise, disons que le discours des manuels reflète, implicitement, l’acceptation de cet état de fait. Cette étude, qui reprend et surtout prolonge les travaux issus de ma thèse, porte sur 70 manuels de terminale (et première pour le programme de 2011) et 40 manuels de troisième, regroupés selon les périodes des programmes et analysés selon une méthode combinant les approches quantitative et qualitative.
Databáze: OpenAIRE