Pour une éthicosmopolitique à venir Réflexions sur le consentement meurtrier 1 Marc Crépon

Autor: Crépon, Marc
Přispěvatelé: Pays germaniques , histoire - culture - philosophie (UMR8547) (PG,HCP), Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Département de Philosophie - ENS Paris, École normale supérieure - Paris (ENS Paris), Université Paris sciences et lettres (PSL)-Université Paris sciences et lettres (PSL)-École normale supérieure - Paris (ENS Paris), Université Paris sciences et lettres (PSL)-Université Paris sciences et lettres (PSL), Pauline Bégué et Zona Zaric, Laurence Joseph, CREPON, Marc
Jazyk: francouzština
Rok vydání: 2021
Předmět:
Zdroj: Soin et compassion. Un nouveau paradigme pour la philosophie politique
Pauline Bégué et Zona Zaric. Soin et compassion. Un nouveau paradigme pour la philosophie politique, Hermann, 2021, Psychanalyse, 979 1 0370 0873 2
Popis: International audience; Que désigne-ton sous le nom de consentement meurtrier ? Rien moins qu'une dimension incontournable de notre appartenance au monde, qu'il faut savoir identifier, de façon principielle, si l'on ne veut pas se payer aussi bien des mots de la morale que des ruses de la politique. Commençons donc ! On admettra tout d'abord qu'une relation à autrui responsable, s'il en est une, ne saurait être fondée sur autre chose que l'attention, le soin et le secours qu'exigent pour tous et de partout sa vulnérabilité et sa mortalité. Toute autre position reviendrait à souscrire cyniquement aux arrangements d'une casuistique partisane (celle du clan, de la famille, de l'ethnie, de la religion, du parti, etc.) qui se sentirait autorisée à décréter qu'il est, dans une société donnée (ou dans tout autre espace), une catégorie déterminée d'individus, dont les souffrances et la mort la laissent indifférent. Franchissant une étape supplémentaire, on soutiendra qu'il s'agit là du principe premier d'une éthique radicale, absolue, intransigeante, excessive peut-être, hyperbolique, au sens de Derrida. Mieux encore, on reconnaîtra que cette éthique de la responsabilité ne saurait souffrir aucune exception. A la différence des morales particulières (celles des catéchismes moraux), elle s'applique à tous et ne saurait être réservée à une partie seulement de l'humanité, sauf à se compromettre et se ruiner aussitôt. Et l'on se rappellera que cette ruine (qui est aussi celle de la conscience) advient chaque fois que la morale tombe dans les pièges d'une politique calculatrice, dont elle se soucie de défendre les intérêts, fût-ce au prix de ses principes et de ses convictions. N'estce pas, au demeurant, ce dont l'histoire offre de nombreux exemples, quand tant de morales particulières, de dogmes, de catéchismes religieux, toutes confessions confondues, ont apporté leur caution ou leur justification à des violences terribles, comme s'il leur fallait payer leur place dans la société du prix d'un sang consenti ? Ceci étant, on se demandera peut-être pourquoi, contre l'évidence du mal et de la cruauté, il nous faudrait encore chercher les principes d'une éthique universelle, affranchie des compromissions meurtrières de la morale et de la politique. N'est-il pas illusoire de vouloir échapper à ce qui semble si profondément ancré dans la nature humaine, à savoir que les hommes s'accommodent pour leur propre compte (ou celui des forces qu'ils soutiennent), des violences qu'ils condamnent chez les autres ? Pourquoi ne pas admettre tout simplement la ruine de l'éthique, en reconnaissant qu'il nous est impossible de ne pas nous arranger avec les souffrances et la mort d'autrui ? Pour une seule raison, en vérité. Parce que si nous acceptions cette ruine comme une fatalité, il n'y aurait plus de limite à la violence. Rien ne serait susceptible de la contenir et de la retenir. L'éthique est désirable, parce que renoncer à son désir reviendrait à consacrer le
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