Littérature et science des lacs : Jean-Jacques Rousseau et Deluc au bord du Léman, ou la limnologie d’avant la limnologie

Autor: Touchart, Laurent
Přispěvatelé: Université d'Orléans, SCD, Bertrand Sajaloli, Sylvie Servain-Courant, Centre d'Etudes pour le Développement des Territoires et l'Environnement (CEDETE), Université d'Orléans (UO), Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage, Groupe d’Histoire des Zones Humides
Jazyk: francouzština
Rok vydání: 2013
Předmět:
Zdroj: Zones humides et littérature-Actes des 7e journées du Groupe d’Histoire des Zones Humides
Zones humides et littérature-Actes des 7e journées du Groupe d’Histoire des Zones Humides, Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage; Groupe d’Histoire des Zones Humides, Dec 2011, Blois, France. pp.31-38
Popis: The cultural and scientific conditions existing on the shores of Lake Geneva in the 18th century had built a good environment for the creation of limnology a century later by François-Alphonse Forel. This paper attempts to assess the influence of the philosopher and writer Jean-Jacques Rousseau in the emergence of a science of lakes before the birth of limnology, through the links and connections he had forged with the Deluc brothers, geologists and climatologists of the Lake Geneva. Geography has largely contributed to this development. On the one hand, there was a continuity of the place of Lake Geneva, which is the water body where the main limnological discoveries in the world were made for several centuries. On the other hand, limnology was epistemologically first of all a geography of lakes, which remains in certain practices of the contemporary approach of the scientific study of lakes. More generally, the paper attempts to rehabilitate the role of social sciences in limnology, by showing that, from the 18th century to the present, working hypotheses, including in “hard sciences”, are provided by society.The first part studies the “battle zone” of the River Rhône at the entrance to Lake Geneva in the epistolary novel The new Heloise, to show its epistemological importance in hydrological sciences for the discovery of turbidity currents. The second part approaches nature and the landscape in Rousseau's work from the perspective of limnogeography, and lays the groundwork for the imagination of great immeasurable depths. The third part presents the literary and epistolary sources of this research: the published work of Jean-Jacques Rousseau, his travel diary, his letters, as well as Guillaume-Antoine Deluc’s family diary. The fourth part compares the depth measurements made by Rousseau and Deluc in 1754 with those of the bathymetric map of Horace Benedict de Saussure, to refute the generally accepted hypothesis according to which the Saussure’s mistake would have been caused by a simple inadvertently. The author of this paper thinks that the geography of the shores, the steep landscape of Meillerie and popular belief provided eighteenth-century scientists with their hypotheses for scientific work and that, as is often still today, it was difficult to admit or to consider that they may be refuted.
Les conditions culturelles et scientifiques existant sur les bords du Léman au XVIII e siècle avaient construit un contexte favorable, qui aboutit à la création de la limnologie un siècle plus tard par François-Alphonse Forel. L’article tente d’évaluer le rôle de l’écrivain Jean-Jacques Rousseau dans l’éclosion de cette science des lacs d’avant la limnologie, à travers les liens qu’il avait tissés avec les frères Deluc, géologues et climatologues du Léman. Le fil directeur se trouve être de souligner l’importance de la géographie dans cette évolution. Il s’agit d’une part de mettre en avant la continuité du lieu, en l’occurrence du Léman, en tant que lac où se firent les principales découvertes limnologiques mondiales pendant plusieurs siècles. Il s’agit d’autre part de rappeler que, sur le plan épistémologique, la limnologie a d’abord été une géographie des lacs, un héritage qui subsiste dans certaines pratiques de la démarche contemporaine d’étude scientifique des lacs. Plus généralement, l’article tente de réhabiliter la place des sciences humaines et sociales en limnologie, en montrant que, du XVIII e siècle à aujourd’hui, les hypothèses de travail, y compris en « sciences dures », sont fournies par la société.La première partie aborde la description par Rousseau, dans la Nouvelle Héloïse, du phénomène de la bataillière du Rhône à l’entrée du Léman, pour en montrer l’importance épistémologique dans la découverte des courants de turbidité. La deuxième partie revisite la nature et le paysage rousseauistes sous l’angle des prémisses de la géographie limnologique, et pose le jalon de l’imaginaire des grandes profondeurs insondables. La troisième partie présente les sources littéraires et épistolaires de cette recherche : l’œuvre publiée de Jean-Jacques Rousseau, son carnet de route, ses lettres, ainsi que le journal de famille de Guillaume-Antoine Deluc. La quatrième partie compare les mesures de profondeur effectuées par Rousseau et les Deluc en 1754 avec celles de la carte bathymétrique d’Horace Bénédict de Saussure, pour réfuter l’hypothèse généralement admise selon laquelle l’erreur de ce dernier aurait été commise par une simple inadvertance. L’auteur de cet article pense que la géographie des lieux, le paysage escarpé de Meillerie et la croyance populaire ont fourni aux savants du XVIII e siècle leurs hypothèses de travail scientifique et que, comme souvent encore aujourd’hui, il était difficile d’admettre ou d’envisager qu’elles fussent infirmées.
Databáze: OpenAIRE