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Cet article passe en revue l'évolution des conceptions concernant les bases biologiques du déplacement dentaire provoqué. Les hypothèses du dix-neuvième siècle proposaient deux mécanismes d'explication : l'application de pression et de tension sur le ligament alvéolo-dentaire, et la courbure de l'os alvéolaire. Les études histologiques du début et du milieu du vingtième siècle ont montré que ces deux phénomènes survenaient de façon concomitante, et que les cellules, comme les composants extra-cellulaires du ligament alvéolo-dentaire et de l'os alvéolaire, participent à la réponse à l'application de forces mécaniques, dont le résultat est une activité de remodelage.Les expériences en culture de tissus ont montré que la déformation des cellules peut provoquer une activation cellulaire, par l'ouverture des canaux ioniques de la membrane cytoplasmique, ou par la cristallisation des filaments du cytosquelette. La déformation mécanique de matrices collagènes minéralisées ou non, peut, d'un autre côté, produire des phénomènes bio-électriques (potentiels créés par des forces ou des courants) capables de stimuler des cellules par la modification de la charge électrique de leur membrane ou de leur enveloppe liquide. Sur un animal vivant, les perturbations mécaniques de l'ordre d'environ 1 mn/j. sont apparemment suffisantes pour provoquer d'importantes réponses ostéogéniques, peut-être dues aux protéoglycanes de la matrice à memoire de contrainte.Les cellules du ligament alvéolo-dentaire humain, isolées par des enzymes, répondent de façon biochimique aux signaux mécaniques ou chimiques : endocrines, autocrines et paracrines. Des études histochimiques et immuno-histochimiques ont montré que, durant les premières phases du déplacement dentaire, les fluides du ligament alvéolo-dentaire se sont déplacés et que les cellules et la matrice sont déformées. Les neurotransmetteurs vaso-actifs, émis par les plexus nerveux périodontaux, obligent les leucocytes à migrer à travers les capillaires adjacents. Les cytokines et les facteurs de croissance sont sécrétés par ces cellules, stimulant les cellules du ligament alvéolo-dentaire et de l'os alvéolaire afin qu'elles remodèlent leurs matrices. Cette activité de remodelage facilite le mouvement des dents vers les zones où l'os a été résorbé.Il ressort de ces informations que chez les mammifères, de nombreux types cellulaires sont impliqués dans la réponse biologique à la force mécanique appliquée sur la dent, et par là-même sur l'os. Ce sont essentiellement les cellules des systèmes nerveux, immunitaire et endocrine qui sont impliquées dans l'activation et la réponse des cellules du ligament alvéolo-dentaire et de l'os alvéolaire à l'application d'une force. Ceci implique que la recherche concernant la réponse biologique à l'application d'une force sur les dents devrait être suffisamment large pour inclure l'exploration d'associations possibles entre les phénomènes physiques, cellulaires et moléculaires. Les objectifs de ce champ d'investigation permettent d'expliquer les principes fondamentaux, en particulier en extrapolant les nouveaux résultats à l'environnement clinique, car des millions de patients subissent l'application de forces mécaniques sur leurs dents pendant de longues périodes afin d'améliorer leur position dans la cavité buccale. Les récents outils que la recherche a mis au point, comme les techniques de culture cellulaire, et les investigations immunologiques, sont le meilleur espoir pour y parvenir. |