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La multiplication des publications en ligne et des magazines de marque, le phénomène des blogues sur Internet, le déclin de la presse d’information générale payante et le succès de la presse gratuite et des magazines, sont autant de lieux de manifestation des transformations à l’œuvre dans les médias. Celles-ci touchent l’ensemble de la production et de la diffusion d’information : extension des domaines d’intervention des entreprises de presse au-delà de l’expertise journalistique vers la gestion de l’information publique ou promotionnelle ; élasticité de la fonction journalistique entre l’information et la production de contenu ; modulation de la mission d’information par la prise en compte accrue du destinataire à capter ; cœxistence temporelle du flux de l’actualité et du stock de l’archive ; fragmentation accrue et instabilité croissante des publics. Nous assistons à un « brouillage » croissant des frontières qui semblaient jusque-là établies entre les stratégies, les pratiques, les identités, les produits, les énonciations, les usages. Est-il possible de rendre compte de ces mouvements autrement qu’en termes de confusion, de subversion, de domination, de renoncement ? Partant du postulat que le journalisme n’a jamais eu l’homogénéité qu’on lui attribue, les contributeurs de cet ouvrage s’efforcent de décrire des objets en mutation dans une perspective non normative. En s’appuyant sur les concepts foucaldiens de « formation discursive » et de « dispersion », ils font apparaître les discontinuités dans les pratiques nouvelles et entre les acteurs en émergence, mais aussi les airs de famille qui les rattachent au journalisme. Ainsi, d’objets a priori marginaux, les « gratuits » d’information générale, le magazine Epok de la Fnac, les blogues « d’information éthique », le discours de l’intime dans la presse féminine, apparaissent comme autant de manifestations dispersées d’une même pratique discursive - le journalisme - mais qui ne peut se réduire à l’espace, même « flou », de son exercice professionnel. Revendiquant une approche « socio-discursive », les études ici présentées multiplient les angles et les méthodes : de l’ethnographie des acteurs à l’étude économique, de l’analyse de discours à la sociologie des professions, des stratégies d’entreprise à l’étude de la réception. Il ne s’agit pas pour autant de proposer une juxtaposition de points de vue, ni un syncrétisme de mauvais aloi, mais de montrer que le journalisme - comme toute activité de production discursive - est un travail permanent sur les normes (en particulier les normes de « genres ») qui en retour le constituent. L’identité journalistique ne peut être définie par un catalogue de formes, mais comme une pratique toujours en invention entre des logiques homogénéisantes et ses résurgences dispersées. |