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Prenant fait et cause pour le style de Cormac McCarthy, rigoureusement ascétique dans No Country for Old Men, l’adaptation des frères Coen propose plusieurs séquences où, du fait de l’absence de paroles, de l’économie de musique extradiégétique et de la raréfaction des bruits, le spectateur se retrouve confronté à un (relatif) silence cinématographique dans lequel le moindre son, habituellement imperceptible, est susceptible de devenir intelligible. On se souciera tour à tour du rôle dramaturgique que ce silence coenien joue dans l’univers fictionnel de No Country for Old Men et de l’espace premier dans lequel il se déploie. On examinera aussi la manière dont le silence initié par McCarthy est pensé en termes audiovisuels. Pour y parvenir, on étudiera comment, lors du passage de l’écrit à l’écran, certaines propriétés sont abandonnées pour mieux en nourrir d’autres. Grâce à cette esthétique filmique qui mise sur un nombre très réduit d’attributs, nos oreilles sont aux aguets, traquant le moindre signal, tandis que nos regards se portent sur des visages, des corps et des décors qui investissent alors tout le cadre, revenant aux fondements cinématographiques. De cette constante poétique du minimalisme ressurgit ainsi, en matière de vue et d’écoute, le strict nécessaire : il suffit amplement à créer de la sensation et à satisfaire notre désir de compréhension. Taking up the cause of Cormac McCarthy’s rigorously ascetic style in No Country for Old Men, the Coen brothers’ adaptation offers several sequences where, due to the absence of words, the economy of extradiegetic music and the rarefaction of noises, the spectator finds himself confronted with a (relative) cinematographic silence in which the slightest sound, usually imperceptible, is likely to become intelligible. We will examine in turn the dramaturgical role that this silence from the Coen movie plays in the fictional universe of No Country for Old Men, and the primary space in which it unfolds. We will also examine how the silence initiated by McCarthy is translated into audiovisual terms. We will thus study how, during the passage from the written word to the screen, certain properties are abandoned in order to better fuel others. Thanks to this film aesthetic which relies on a very limited number of attributes, our ears are pricked up, tracking down the slightest signal, while our eyes are focused on faces, bodies and setting elements which then take over the entire frame, reverting to cinematic foundations. Strictly necessary visual and auditory elements hence stem from the constancy of such poetics of minimalism: they are more than enough to create sensation and to satisfy our desire for understanding. |